Sacre travail !!! Quelquels points où je ne suis pas tout à fait d accord mais certainement pas vécu les choses de la même manière !
Pour débuter, je suis médecin spécialiste sur La Rochelle, en libéral, sortant de 10 ans d'hôpital public.
Vous aviez combien de réanimateurs dans le groupe et ils venaient d où ? Pour l histoire du tri de patients j ai jamais entendu de problème de ce genre là entre mes collègues réanimateurs ( Bordeaux Toulouse Paris Strasbourg ) après les personnes les plus faibles ou âgées n ´ allaient pas en réanimation mais comme d habitude compte tenu de la violence de la rea et de l intubation. Ce principe de "tri" a été rapporté par les médias et présenter comme secondaire au COVID alors que ces choix se font tous les jours, il serait intéressant d'avoir des données fiables pour savoir si cela s'est vraiment produit ..... Bon pour Raoult j en parle pas pour éviter d'être trop désagréable (en fait j'en parle un peu!!!)mais vraiment pas certain que mentir aux patients fait parti de se comporter comme un médecin comme le conclut le paragraphe. Etre médecin ne veut pas dire donner au patient ce qu 'il veut, la relation médecin-malade est basé sur l'écoute, le soin, la confiance, tous les jours on annonce à des patients qu'on ne peut rien faire d'un point de vue traitement (cancer qui échappe aux traitements, insuffisance cardiaque, hépatique en fin de course) et ce n'est pas pour ça qu'on les laisse seul et qu'on ne s'occupe pas d'eux. Ce même médecin nous expliquait qu'il n'y avait pas de risque de seconde vague puis il y a quelques semaines il nous disait qu'il n'était pas devin et ne pouvait pas savoir..... enfin une phrase juste. Etrangement il m'a beaucoup fait penser à beaucoup de professeurs émérites qui ont certainement un problème d'égaux, qui parlent beaucoup à des congrès pour dire comment traiter les patients mais qui en voient peu compte tenu du nombre de réunions et congres dont ils s'occupent. Enfin j ai lu à chaque fois les directives de l Ars et je ne me souviens pas qu ils aient demandé de ne pas voir les patients. Ils demandaient que les patients appellent avant le médecin traitant qui décide de les recevoir ou de les envoyer directement par samu aux urgences et d’organiser nos salles d attente pour ne pas que les patients se croisent Après le scandale a été pour moi le manque de masque qui pouvait nous empêcher de consulter en sécurité, mais la machine hospitalière et ministérielle est tellement folle que je ne suis pas certain que quelqu'un savait combien de masque ils avaient en stock véritablement
L'autre problème est qu on autorise seulement à l hôpital d'utiliser certaines drogues pour les fins de vie obligeant des patients fragiles d être transféré à l hôpital pour une fin de vie : ce n est pas la place de cette personne, ce n'est pas le rôle de l'hôpital et les médecins traitants avec une formation pour certain pourraient très bien le faire dans la chambre du patient ( c est pas de l euthanasique bien évidemment mais de l acccompagnement ). Après sur ce monde médical hôpital et ars géré par l administration avec plus aucune logique médical ..... faut mieux ne pas trop en parler pour éviter la crise hypertensive !! En tout cas sacré boulot pour ceux qui ont initié ce projet et merci de nous donner la possibilité d'échanger
Au fond vous commentez la lettre ouverte et vous "contestez" en disant des choses dont certaines sont contestables et discutables. Alors...;discutons. Est-ce que vous ne minimisez pas la question du tri des malades dits vulnérables? C'est vrai que la réanimation n'est pas une partie de plaisir, mais cela implique-t-il comme à Colmar par exemple où un médecin réanimateur témoignait à la télévision dans un film très interessant sur ce qui s'est passé dans l'Est de la France (je vous assure qu'il ne se sentait pas très bien) où précisément avait dû ne pas prendre en charge un malade de 81 ans ...faute de place dans cet hôpital, les autres de la région ne pouvant l'accueillir et parce qu'il fallait garder un lit pour accueillir un patient plus jeune. . Quelle détresse pour ce médecin et ses collègues!! Pour avoir vu le film je vous assure que c'était choquant. Quelle tristesse!Surtout que si on vous croit, c'est une pratique habituelle.
Je passe sur le manque de matériel, catastrophique.
Ouvrons les yeux: des infirmières protégées par des sacs poubelle, des masques manquants, des tests...infaisables ou peu fiables, manque de lits de réa etc....
Nous nous éloignons du pic de la crise mais n'oublions pas ce qui s'est passé. la situation pourrait être dramatique avec un virus plus virulent.
Je retiens votre proposition pour les fins de vie: les généralistes sont tout à fait capables d'accompagner une fin de vie, mais sans doute l'administration ne le sait pas ou ne le croit pas.
Il y a parmi les médecins à l'initiative de ce collectif un généraliste qui vous confirmera que les médecins n'avaient pas la possibilité d'aller voir leurs patients, ne serait-ce que parce que pendant plusieurs semaines ils n'auraient pu le faire qu'au risque d'être eux-mêmes contaminés. Vous savez certainement que plus de 30 médecins ont laissé leur peau dans cette période. Vous n'avez pas entendu parler du procès que cette femme de médecin intente, son mari a contracté le virus dans la période sans masque et en est mort!
Pour Raoult vous semblez vous contenter d'une critique du personnage, sans doute "sûr de lui", sans doute par trop médiatique mais vous êtes vous demandé pourquoi un tel succès? Cela ne tiendrait-il pas, bien au-delà de ce débat incroyable sur l'hydroxychloroquine, à la place qu'il a occupé, pas celle de directeur de IHU mais celle du médecin qui soigne quand tous les autres attendent le résultat d'études scientifiques dont on a pu mesurer les résultats...quand on les a.
Avez vous entendu les "officiels" parler de la relation médecin-malade, pensez vous que le pouvoir politique a fait ce qu'il fallait pour calmer la peur panique des gens?
Peut-on transformer le système de santé et comment? J'ai bien lu que vous avez quitté le CHU après dix ans je suppose que ce n'était pas sans raison.
Merci en tout cas pour votre post, il est la preuve qu'il faut parler de ce qui s'est passé, en discuter, échanger nos points de vue et que le plus grand nombre de personnes le fassent. Nous y apprendrons tous des choses, laissons les égos au placard, ils ne sont pas de mise (il faudrait le rappeler aux "patrons parisiens" et laisser la "comtesse de Ségur aux enfants).
A bientôt sur le site ou ailleurs. Albert Nguyên
Dans un premier temps, merci pour votre post qui amène une discussion
La question des recommandations que vous soulevez est capitale.
Évidemment il n’était pas écrit, ne consultez pas votre médecin, mais il était question d’une part d’inciter les patients à ne pas se déplacer (restez chez vous) et d’autre part de contacter le médecin par téléphone en cas de symptômes évoquant l’infection, les patients suspects étaient censés porter un masque introuvable à ce moment de l’épidémie et s’isoler de leur entourage.
La machine administrative n’a évidemment pas écrit, ce qui aurait pu constituer un délit manifeste de non assistance à personne en danger, mais elle s’est arrangée pour vous faire comprendre qu’il fallait privilégier la téléconsultation (levée des conditions de téléconsultation et exonération de l’acte) et à l’étendre même à la communication téléphonique pour certains patients.
La désertification des cabinets médicaux en est l’illustration. Les instances ont même dû rappeler les patients suivis pour pathologie chronique pour qu’ils consultent.
On peut tout de même s’interroger sur le plébiscite de la téléconsultation pour pallier aux manques de matériel et évoquer ses limites et l’artifice qu’elle constitue dans certaines situations, qui plus est quand on apprend que certains patients n’éprouvent une gêne respiratoire que lorsque que leur taux d’oxygène sanguin est déjà très critique.
A mon sens, rien ne remplace un acte médical qui comprend évidemment un examen, un recueil de constantes mais bien au delà constitue un accueil dont les effets ne sont pas mesurables par les recommandations.
Lorsque vous ne pouvez pas vous procurer de masques parce que tous les stocks sont réquisitionnés par l’état, que les masques de vos dotations sont périmés et défectueux, comment pouvez vous exercer dans de bonnes conditions? Il y a évidemment le système débrouille qui a coûté la vie à certains.
Enfin quand vous parlez d’éviter la crise hypertensive, je l’entends. Beaucoup de médecins éprouvent l’agacement dont vous parlez probablement, j’en ai moi même souffert. Mais combien de temps allons nous éviter précisément? nous soumettre et accepter l’inacceptable?
Il me semble que lorsqu’un système en arrive à ne plus vous permettre d’exercer votre pratique médicale pour vos patients et vous même dans de bonnes conditions, l’heure de la discussion a plus que jamais sonné pour envisager un système où les soignants, les usagers parlent, participent aux échanges et ne se laissent plus exclure de ce qu’une administration comptable a décidé pour eux.
En espérant de futurs échanges et d’autres discussions
En lisant vos propos, il semblerait qu'éviter à tout prix les prises de tête ne permette pas d'éviter les crises hypertensives, dont nous avons, pour la plupart, été victimes ces derniers mois.
Concernant la technocratisation de notre système de soins, Frédéric Pierru, sociologue et politiste de la santé, a publié un article sur egora, dans lequel il revient sur la création des ARS (elles viennent de fêter leurs 10 ans!), leurs missions initiales, et critique leurs liens féodaux avec les politiques. Il explique son point de vue sur les dysfonctionnements de ces dernières, leur fonction "bouc émissaire" et leur hétérogénéité. Il soumet, en conclusion, quelques réformes possibles de leur organisation interne car selon lui, la santé doit rester à la main de la politique.
Sans que cela soit antagoniste, les professeur et médecin hospitalier Gérard Reach et Sadek Béconcif, demandent, dans une tribune semblable, une inversion de gouvernance, soit l'administration au service des soignants pour les aider à remplir leur mission de soins, de prévention, et ainsi leur permettre de, je les cite,"se réapproprier la responsabilité du soin".
Il s'agit donc d'adapter l'administratif aux réalités du terrain et non les réalités du terrain aux objectifs administratifs.
Je joins les articles cités, transférés d'un site internet, en espérant que cela soit lisible. J'y ajoute le témoignage du vécu de la crise d'un médecin de l'ARS. Je ne sais pas si cela va nous aider à discuter mais il me semble important d'écouter leurs versions.
Bonsoir
Je n’ai pas eu le temps de lire vos tribunes mais j’aime bien l’effort que vous nous demandez d‘écouter la parole d’un membre de l’ARS. Ce n’est que comme ça qu’on finira par déboucher.
Je rebondis par contre sur la question du tri. Je voulais apporter le témoignage d’un copain pneumologue à la clinique Parly 2 qui, ayant été réanimateur au début de sa carrière a courageusement repris du service et assumé un service d’une vingtaine de lits de réanimation dans les locaux de sa clinique. Il a lui aussi du faire des choix devant l’afflux des patients et ne pouvait les transférer faute de place dans les services de réa habituels. Il m’a raconté plusieurs semaines après avec une voix mrquée par l’émotion, le tri qu’il a du faire d’un patient certes octogénaire, mais qui était très bien. Cela l’a marqué profondément et je l’inciterai à partager son expetience dans ce blog. Sachez que j’ai eu dans mon service de réanimation des patients agés de plus de 80 ans qui s’en sont sortis. Car nous avions la place et le temps de de les prendre en charge. Je n’en veux absolument pas à mes collègues de l‘est ou Parisiens; que pouvaient ils faire d’autre. Mais ce choix laissera des traces. Le système qui a permis cela est lui criticable ne serait ce que pour ne pas répéter les mêmes erreurs.
Alexandre Boyer, réanimateur au CHU de Bordeaux